Traumatismes sexuels : quand le corps se souvient, même si l’âme voudrait oublier
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- 14 sept.
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Dernière mise à jour : 15 sept.

Certaines blessures ne se voient pas. Elles ne laissent ni bandage ni cicatrice visible, mais elles imprègnent la mémoire, les gestes quotidiens et le rapport à soi. Le traumatisme sexuel est de celles-là : invisible, mais omniprésent. Il se manifeste dans un souffle court quand on croise un inconnu, une gorge qui se noue sans raison, un désir qui s’éteint soudain. Même quand l’esprit tente d’oublier, le corps, lui, garde la mémoire.
Quand l’impensable fait effraction
Un viol, un inceste, un attouchement… ces expériences ne sont pas seulement des atteintes physiques. Elles sont une effraction psychique, un débordement insupportable de l’appareil psychique. Confrontée à l’impensable, la victime ne peut ni comprendre, ni symboliser. Alors, elle survit comme elle peut :
Sidération : le corps se fige, impossible de fuir ou de crier.
Dissociation : impression de flotter hors de soi, de regarder la scène de l’extérieur.
Clivage ou vide intérieur : séparation entre ce qui est vécu et la conscience, pour ne pas s’effondrer.
Ces mécanismes protègent et permettent de vivre sur le moment, mais empêchent l’intégration de l’événement. Ce qui n’a pas pu être dit revient sous d’autres formes : cauchemars, phobies, douleurs chroniques, perte de désir, honte.
« J’étais là, mais ailleurs. Comme si cela arrivait à quelqu’un d’autre. » — Élodie, 34 ans.
Les conséquences invisibles
Un traumatisme sexuel ne s’arrête jamais à l’événement. Il s’inscrit dans le temps long, infiltrant la vie sous des formes diverses.
Sur le corps : vaginisme, troubles de l’érection, douleurs pelviennes ou digestives, fatigue inexpliquée.
Sur le psychisme : anxiété diffuse, crises d’angoisse, cauchemars, hypervigilance.
Dans les relations : difficulté à faire confiance, peur de l’intimité, isolement.
Dans la vie affective : perte de désir, blocages sexuels, honte et culpabilité persistantes.
Cas clinique :Marc, 42 ans, consulte pour des douleurs dorsales récurrentes. Aucun médecin ne trouve d’explication. En thérapie, il met en lien ces douleurs avec un abus subi dans l’adolescence, longtemps refoulé. Le corps a parlé à sa place.

Les ressentis des victimes : un paysage intérieur bouleversé
Après le choc, la vie reprend, mais jamais comme avant. Les victimes décrivent un monde fissuré :
La honte : se sentir marquée, souillée, parfois se laver compulsivement comme pour effacer l’invisible.
La peur : sursauter au moindre bruit, verrouiller trois fois la porte, sentir son cœur s’emballer lorsqu’un inconnu suit ses pas.
La culpabilité : se reprocher de ne pas avoir crié, pas avoir fui, comme si l’on pouvait être responsable de sa propre paralysie.
L’isolement : préférer le mutisme à la peur d’être jugée, s’enfermer dans un silence qui devient un mur.
Le blocage du désir : craindre la tendresse, refuser le contact, redouter la confiance.
Cas clinique : Sophie, 29 ans : « Je riais avec mes amis, mais à l’intérieur tout était figé. Comme si ma vie s’était arrêtée ce jour-là. »
Ce que la psychanalyse éclaire
Freud parlait de névrose traumatique : un choc trop violent pour être assimilé revient sous forme de symptômes, comme un cauchemar qui se répète.Ferenczi décrivait la confusion des langues : l’enfant attend la tendresse, mais reçoit une réponse sexuelle, incompréhensible et destructrice.Winnicott montrait que l’abus brise le sentiment de sécurité fondamentale, cet appui invisible qui permet normalement de grandir.
Les recherches contemporaines (Judith Herman, Bessel van der Kolk) confirment : le traumatisme s’imprime aussi dans le système nerveux. Le corps garde la mémoire. Des décennies plus tard, le cerveau peut rester en état d’alerte, comme si le danger menaçait encore.
Comprendre cela permet de déculpabiliser : ce ne sont pas les victimes qui « exagèrent », mais leur corps et leur psychisme qui continuent de réagir pour survivre.
Le poids du silence
Pourquoi tant de victimes se taisent-elles ? Parce que le silence semble d’abord protéger que la honte les étouffe. Parce qu’elles craignent de ne pas être crues. Parce que l’agresseur a parfois inversé les rôles, instillant l’idée que la faute venait d’elles.
Ce silence, longtemps protecteur, devient une prison:
La peur d’être jugée.
Le sentiment de culpabilité.
Le poids d’une société qui détourne trop souvent le regard.
Mettre en mots, c’est briser les chaînes. C’est reprendre la main sur une histoire confisquée.
« Pendant trente ans, je n’ai rien dit. Le jour où j’ai parlé en thérapie, j’ai eu l’impression de respirer pour la première fois. » — Anne, 52 ans.
Les chemins de reconstruction
Guérir d’un traumatisme sexuel ne signifie pas effacer l’événement.
C’est le transformer en récit, passer de victime à survivant(e), puis à vivant(e).
Reconnaître : comprendre que la faute appartient uniquement à l’agresseur.
Parler : déposer le poids du secret dans un lieu sûr. un lieu sûr.
Apaiser le corps : écouter les tensions, les douleurs, les blocages comme des messages.
Explorer les théories :
1.Psychanalyse : remettre en mots l’indicible, apprivoiser la honte et la culpabilité.
2.Hypnose thérapeutique : activer les ressources inconscientes, réintroduire sécurité
3.EMDR pour désensibiliser les images traumatiques figées.
4.Sexothérapie : réapprivoiser le corps, retrouver une intimité à son rythme.
5.Thérapies corporelles ( Somatic Experiencing, yoga thérapeutique, sophrologie) : pour libérer les tensions ancrées.
Cas clinique : Sophie, 29 ans, n’arrive pas à avoir de rapports sans douleur. En sexothérapie, elle apprend progressivement à renouer avec son corps, non par contrainte, mais par des exercices de douceur et de redécouverte sensorielle.

Réapprendre à s’aimer
Après un traumatisme sexuel, s’aimer paraît impossible. Pourtant, c’est au cœur de la guérison :
Se réconcilier avec son corps : le traiter avec douceur, le voir comme un compagnon, non comme un champ de bataille.
Apprendre à poser des limites : dire “non” sans honte.
Se donner de la tendresse : se regarder avec bienveillance, offrir à son corps repos, soins, gestes de réconfort.
Redécouvrir le plaisir simple : marcher pieds nus dans l’herbe, savourer un repas, respirer en paix.
S’aimer à nouveau, c’est reconnaître qu’on est plus vaste que sa blessure. C’est ne plus se définir par l’agression, mais par la capacité à renaître.
Outils concrets :
Écriture : déposer dans un carnet ce qui ne peut encore se dire.
Respiration consciente : pratiquer la cohérence cardiaque pour calmer l’hypervigilance.
Visualisation : imaginer un lieu ressource, sûr et apaisant.
Réapprentissage du non : retrouver la force de poser une limite claire, sans culpabilité.
Groupes de parole : partager avec d’autres survivant(e)s, sortir de l’isolement.
Conclusion
Un traumatisme sexuel est une effraction, mais il n’est pas une condamnation. On ne revient jamais à "l’avant". Mais on peut inventer un "après" différent mais libre, habité, authentique.
Une cicatrice n’efface pas la blessure, mais elle devient une ligne de force. Elle dit qu’il y a eu douleur, mais aussi réparation.
Vous n’êtes pas seul(e) : chercher de l’aide, c’est déjà poser un premier pas vers la liberté, et réapprendre à s’aimer.
Une cicatrice ne dit pas seulement qu’il y a eu blessure. Elle dit aussi qu’il y a eu guérison, résistance, vie. C’est dans cette nuance que renaît la liberté.
« Pendant longtemps, je n’ai été qu’une survivante. Aujourd’hui, je suis vivante. Pas totalement guérie, mais libre. »— Élise, 45 ans.
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Berrine Janssoone
Psychanalyste



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